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Après les grèves et le covid, une ètoile fait enfin ses adieux a’ l’opèra

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“Je pense que c’était ma dernière chance comme m’a dit Aurélie (Dupont, directrice de la danse à l’Opéra, ndlr)”, plaisante l’Italienne de 42 ans dans une loge après une répétition du “Jeune Homme et la Mort” de Roland Petit au Palais Garnier.
“Je ne suis jamais partie, on dirait…je retrouve cette énergie incroyable du Palais Garnier, c’est une des plus belles scènes”, ajoute cette danseuse blonde et élancée qui depuis 2015 assume la double casquette d’étoile et de directrice du Ballet de Rome.
C’est avec une soirée en hommage au grand chorégraphe français qu’Eleonora Abbagnato va officiellement dire au revoir à la prestigieuse maison tricentenaire où elle danse depuis 25 ans.
Des adieux qui auraient dû avoir lieu le 23 décembre 2019 mais qui ont été annulés en raison d’une grève historique des artistes et employés de l’Opéra contre la réforme des régimes spéciaux défendue alors par le gouvernement. La pandémie a provoqué deux autres reports. Mais “les choses sont bien faites”, constate la danseuse qui considère l’hommage à Roland Petit comme un “cadeau”, et pour cause: c’est bien lui qui “m’a découverte à l’âge de 11 ans dans une petite école privée de Sicile. Pour moi, c’était le grand chorégraphe de la danse française qui m’a emmenée
à l’Opéra de Paris”, dit-elle. Elle danse dans deux de ses ballets, “Le Rendez-Vous” et “Le Jeune Homme et la Mort” –créé sur un livret de Cocteau et qui met en danse un jeune peintre poussé au suicide par son amante–, un ballet qu’elle a beaucoup dansé dès
l’âge de 19 ans. Les adieux sont une tradition à l’Opéra où les étoiles, à la retraite à l’âge de 42 ans, sont ovationnées sous une pluie de confettis et de paillettes. Mais Eleonora Abbagnato, mariée à l’ex-footballeur Federico Balzaretti, avec qui elle a eu deux enfants, et invitée régulière des plateaux de télé italiens, a depuis longtemps préparé son monde d’après. Ayant voulu “sauver la danse en Italie”, où deux compagnies à Florence et à
Vérone avaient fermé leurs portes, elle prend en 2015 les rênes du Ballet de Rome, avec l’accord du directeur de la danse de l’Opéra à l’époque, Benjamin Millepied.

La compagnie gagne en visibilité sous son mandat avec l’invitation de grands chorégraphes et une collaboration avec Dior, même si elle essuie brièvement en août 2019 une brève crise avec un syndicat de danseurs pour “attitude irrespectueuse”.
Son parcours, depuis sa naissance au sein d’une famille plus intéressée par le foot que par la danse, ressemble à un conte de fées: tombée amoureuse du ballet car sa mère la gardait les après-midi dans une école de danse à Palerme située en-dessous de son magasin de vêtements, repérée par Roland Petit puis par Claude Bessy, la légendaire directrice de l’Ecole de danse de
l’Opéra qu’elle intègre à 14 ans. Elle a été à l’époque l’une des rares étrangères à devenir “petit rat de l’Opéra” et fait aussi partie de la poignée d’étrangers ayant accédé au titre suprême d’étoile. Roland Petit, qui ne ménageait pas la jeune danseuse avec des remarques sur sa souplesse, “me disait que c’était très dur d’entrer dans cette maison”. “C’est le destin qui est bien fait finalement, parce que Roland Petit m’a amenée à tout ces beaux rôles, très très jeune, jusqu’à la fin de ma carrière. Je termine cette grande parenthèse avec lui”, ajoute l’étoile.